Chronique de la transition N0 3 ( Par Titi Sidibé et Mory Mohamed Camara)

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La semaine écoulée a été riche et intense en évènements, d’abord c’était la fête du ramadan le lundi 2 mai, ensuite l’occasion pour les autorités de la transition de préciser leurs intentions quant à la proposition du président d’une durée de 39 mois de la transition. Ainsi du ministre porte-parole du gouvernement, retenons que la durée proposée de 39 mois procède de la nécessité de poser des actes préalables à la fin de la transition. Il reconnait que tous les actes prévus par le chronogramme ne sont pas tous indispensables pour l’organisation des élections, mais ils sont nécessaires pour la bonne marche du pays.
Le groupe dit des 58 partis, autrement appelé le G58, a dénoncé l’unilatéralisme de la durée proposée en considérant que toutes les activités nécessaires au retour à l’ordre constitutionnel sont réalisables dans un délai plus court.
A la question cruciale de savoir quand démarrerait le calendrier du délai proposé par le Colonel Mamady Doumbouya, la réponse des autorités reste quelque peu évasive. Bref, la CEDEAO, ayant été informée de ladite proposition à travers ses émissaires dépêchés à Conakry, devrait rapidement prendre position. L’Union Européenne, quant à elle, s’est fendue d’une déclaration par laquelle elle prend acte de la proposition faite par les autorités de la transition et invite celles-ci à favoriser un dialogue inclusif en vue d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel.
Cela dit, l’un des faits marquants de l’actualité de cette 1ère semaine de mai, reste sans doute l’annonce par le procureur général de l’ouverture d’une information judiciaire pour crime de sang à l’encontre du président Alpha Condé et plusieurs de ses ex collaborateurs. La particularité de l’annonce vient du fait que tant les présumés responsables des « tueries » lors des manifestations sous Alpha Condé, que les organisateurs desdites manifestations sont concernés par les poursuites judiciaires envisagées.
Bref, cette semaine, la Chronique a voulu aborder le positionnement des partis politiques vis-à-vis des autorités de la transition, en général, et du chronogramme proposé, en particulier. Le constat est d’une banalité déconcertante pour qui connait l’environnement politique guinéen des dix dernières années. L’expérience montre que l’attitude des partis politiques d’opposition vis-à-vis de la mouvance présidentielle (RPG arc-en-ciel) dépendait en grande partie de la taille de ceux-ci.
En effet, moins le parti comptait de militants ou de représentants à l’assemblée nationale, plus il était disposé à coopérer avec le pouvoir. Les grands partis d’opposition, souvent dans des groupes parlementaires homogènes, opposaient une franche et ferme adversité à la majorité présidentielle.
Même si parler de partis d’opposition dans le contexte d’un régime d’exception peut paraître incongru, il reste toutefois aisé de mesurer les rapprochements et les distanciations des partis politiques avec le CNRD au fil du temps. Ainsi, logiquement, au lendemain du coup d’état du 05 septembre 2021, seul le RPG et ses alliés étaient ouvertement contre l’avènement du CNRD. Alors que l’ensemble de la classe politique, l’UFDG, l’UFR, le PEDN et le MoDel notamment, avaient applaudi la junte et salué la fin du régime Alpha Condé.
Au fil du temps, et à mesure que le CNRD oriente ses décisions touchant, çà et là, aux intérêts partisans ou individuels, surtout à travers le leviers du pouvoir judiciaire dont on peut aisément à date douter de l’impartialité , des distanciations idéologiques se font jour.
Hier, poussant un ouf de soulagement avec la chute du pouvoir Alpha Condé, les premiers responsables de l’UFDG et de l’UFR, englués dans des affaires judiciaires « téléguidées », font feu de tout bois en s’opposant frontalement à la junte, laissant apparaître très clairement une fracture sinon une nette rupture de confiance à l’égard du CNRD.
Il convient d’emblée de préciser que les partis politiques dits d’opposition au CNRD semblent justifier leurs attitudes comme une réponse au caractère unilatéral et ouvertement « anti partis politiques » des actes de gouvernance depuis le 05 septembre 2021 et non pour les ennuis judiciaires dont le régime se défend de toute manipulation.
La rupture de confiance intervient dans le contexte d’un soupçon de volonté de confiscation du pouvoir, d’une part, et de priorisation d’agendas personnels d’autre part.
En raison des ennuis judiciaires des ministres du régime déchu d’Alpha Condé, notamment l’incarcération du premier ministre Ibrahima Kassory Fofana, le RPG semble avoir pris place aux côtés de ses anciens farouches adversaires comme l’UFDG, pour mener l’opposition au CNRD notamment sur la question de la durée de la transition.
A contrario, comme à leurs habitudes, par modération ou par simples calculs politiques, les partis politiques de moindres envergures, c’est-à-dire ceux ne totalisant généralement pas plus de 5% des suffrages lors des différentes élections, semblent jouer un rôle qui les rapproche plus du CNRD que des grands partis d’opposition dont ils critiquent l’arrogance et le diktat.
De notre point de vue, la guéguerre politique entre partis politiques dits d’envergure et ceux appelés « petits partis » à propos de questions essentiels de la marche du pays semble profiter au CNRD dont les intentions sont à tout le moins illisibles. Alors que le pays gagnerait à voir s’installer un dialogue franc, constructif, inclusif et sincère entre l’ensemble de la classe politiques et la junte militaire au pouvoir en République de Guinée.
Titi Sidibé et Mory Mohamed Camara



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