« L’éthique…exige que ceux et celles qui ont la charge de conduire la transition fassent la déclaration de leurs biens » Me Traoré

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La récupération des biens immobiliers de l’État, en dépit de certaines entorses manifestes à la loi, et les poursuites judiciaires contre des personnalités suspectées, à tort ou à raison, d’avoir commis des infractions économiques et financières sont des actions concrètes à mettre à l’actif de la junte militaire au pouvoir en Guinée.
Le Président Alpha Condé Condé a passé une bonne partie de ses onze années de gouvernance à dénoncer la corruption, les détournements de deniers publics, l’enrichissement illicite sans avoir pris aucune mesure concrète pour combattre ces fléaux.
Mais il est difficile de saluer sans réserve cette initiative tant que les autorités de la transition ne procèdent pas elles-mêmes à la déclaration de leurs biens. Comment convaincre l’opinion que ceux ou celles qui gèrent la chose publique en cette période de transition sont par nature vertueux et qu’on a aucunement besoin de prendre des précautions pour s’assurer qu’ils ne pourraient pas être tentés de suivre le mauvais exemple des anciens gestionnaires des biens publics qui ont maille à partir depuis quelques semaines avec la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF).
L’éthique qui a été invoquée quand il s’est agi de récupérer, dans les conditions que l’on connaît, les maisons de certains acteurs politiques, exige que ceux et celles qui ont la charge de conduire la transition fassent la déclaration de leurs biens. Cela devrait normalement intervenir spontanément c’est-à-dire en dehors de toute réclamation des citoyens et même en l’absence d’une prescription légale expresse. C’est une fois de plus une simple question de cohérence à moins que l’éthique ne s’impose pas à tout le monde ou qu’il s’agisse d’une éthique à géométrie variable.
D’ailleurs, après sept mois de gestion, on pourrait dire que toute déclaration de biens est devenue sans objet car, en toute logique, celle-ci devrait se faire à l’entrée en fonction et à la cessation des fonctions. Tout citoyen est fondé dorénavant à avoir certains doutes quant à la transparence dans la gestion des ressources publiques. Mais, il n’est jamais trop tard pour bien faire.
Moraliser la gestion des affaires publiques est une excellente initiative. Mais il est salutaire que toutes les actions qui doivent être menées dans le cadre de cette entreprise soient, pour une évidente question de crédibilité, accompagnées d’un effort d’exemplarité à tous les niveaux de responsabilité. Ne dit-on pas que l’exemple vient d’en-haut et l’imitation d’en-bas?
Il est vrai que tous ou presque tous ceux et celles qui exercent des fonctions actuellement ont prêté serment et/ou signé un engagement sur l’honneur. Mais est-ce suffisant ? Rien n’est moins sûr.
En tout état de cause, la CRIEF a été mise en place pendant une transition mais elle n’est pas et ne saurait être une juridiction transitionnelle. C’est une juridiction spéciale mais permanente. Elle survivra sans nul doute à la transition à condition qu’elle fasse la preuve de sa compétence, de son professionnalisme, de son indépendance et de sa capacité à mener à bien la mission qui est la sienne.
Maître Mohamed Traoré Ancien bâtonnier de l’ordre des avocats



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