La vie à Conakry : « Quand la survie est l’issue qui vaille, l’indignité n’est pas à plaindre » Par Ibrahima Sanoh

1492

Je ne juge plus,  j’essaie de comprendre. Peut-être ai-je grandi.  » Les jeunes sont ceci ou cela  » ou encore  » ils aiment la facilité « , entend-on.  C’est facile comme jugement.  Très facile.  Le travail paie-t-il ici ? L’art fait-il vivre ?

Tout le monde cherche à survivre. Le fonctionnaire sait que son salaire ne le fait pas vivre. Il doit chercher les à-côtés. Le matin, le policier sorti de chez lui emprunte de l’argent.  »  Cher frère donne-moi 10 000 GNF, je vous le rendrai le soir « , dira-t-il à l’épicier du coin.  Il sait qu’il doit chercher son pain quotidien dans les mains d’autres. Et tous les moyens sont permis ;  il devra payer sa dette et vivre des fruits du capital investi. 

Le ministre ne vit pas de son salaire.  Chaque matin, des solliciteurs de toutes sortes se rendent chez lui, ils le réveillent à travers leurs clameurs. D’autres s’invitent dans son lieu de travail, ils attendront à y être reçus. Chacun y vient avec son problème. Il doit dépenser  par jour plus que son salaire mensuel. Il n’a pourtant pas de génies multiplicateurs de billets. Sachant qu’il doit maintenir son niveau de vie, une fois déchu,  il œuvrera à sa réhabilitation.  Alors, il ira gonfler le rang de l’opposition et sera plein de fiel contre son ancien bienfaiteur.

Le jeune vit dans ce pays où accéder à la fonction publique se fait rarement par le  mérite. Il doit avoir un  parrain ou une marraine.  Les faits montrent que cela est très efficace : ce raccourci vous évite de subir la dureté de la vie et vous donne plus que vous méritez.    Le jeune doit  devenir entrepreneur dans ce pays où le rationnement du  crédit est en vigueur,  où les contrats s’obtiennent  à travers  les relations.  Les liens incestueux entre les grands hommes d’affaires  et les politiques en est l’illustration.

Aussi,  il doit vivre où les plus grands se font marcher sur les pieds pour survivre. Alors, pour survivre, il doit s’adapter aux réalités de son environnement.  Quand la survie est l’issue qui vaille,  l’indignité n’est pas à plaindre.

Par Ibrahima Sanoh



Guinée Nondi, tout ce qui est information de qualité est notre